lundi 19 avril 2010

L'autre monde.


Ahlala. Y a des soirs comme ça, on croirait qu'une nouvelle vie commence.

Ma TV vient de crasher, me privant de Mononoké mais me libérant ainsi du joug télévisuel qui me tenait sous sa peur depuis quelques mois déjà. Ma nouvelle vie commence, où je vais sans doute redécouvrir les livres, le travail acharné, et les petits jeux flash d'Internet.

Néanmoins, je ne vais pas parler ici d'une vie qui reste à faire, mais d'un problème bien plus vital. Les filles. Putain que ce mot fait peur. On croirait presque parler d'une créature impitoyable, qui étriperait sans vergogne quiconque ferait résonner 3 fois son nom. Mais pourtant, elles vivent parmi nous, hommes innocents, aveugle du danger qui rôde. Alors bien sûr, tout ça ressemble à un post de kikoolol qui vient de se découvrir une libido, mais point du tout. Ceci est un regard acerbe sur ce qui ne peut, ce qui ne doit plus rester caché plus longtemps.

Résumons l'affaire. Un binoclard au lycée, côté gente féminine, c'est moyen. Il passe son temps à lire des bouquins, à découvrir Jules Verne, le Seigneur des Anneaux et Dostoïevski. Il a un pote blond qui fait soit du surf, soit du ski, et qu'il regarde s'envoyer les 3/4 du sexe opposé. Et oui, parce qu'au lycée, le superficiel est tendance, et comme le binoclard n'a plus à se préoccuper des filles (qui ne se préoccupe pas plus de lui d'ailleurs), il en profite pour gonfler sa matière grise, étant à la ramasse sur le superficiel. On sait jamais ça peut servir plus tard. Et le binoclard, que l'on appellera affectueusement Gary, a bien raison.

Parce qu'arrivé à l'université, où le temps à fait murir les esprits et les corps, le superficiel a pris un coup dans l'aile, et sa matière grise apparaît forte utile. Les livres qu'il a lu sont devenus le centre de toutes les attentions, et plus personne ne s'intéresse véritablement à la couleur de cheveux. Et Gary se découvre du charme. Ou ce qu'on appelle du charme, c'est à dire cette notion passe partout pour signifier que dorénavant, tu ne manges plus seul à la cantine, tes défauts deviennent ta personnalité, et que les filles te regardent dans la rue. Et la machine s'emballe. Là où Gary pouvait se targuer d'une copine tous les 2 ans, à l'université, il en est étonnamment à 5 filles en 5 mois. Le changement bouleverse évidemment ce jeune binoclard, qui se découvre une part de sex appeal insoupçonnée. Evidemment, la joie est son premier refuge, mais le pauvre Gary ne se doute pas qu'en étant si souvent exposé à l'autre sexe, il entre de plein pied dans un autre monde.

Reprenons Gary, avec ces quelques années de plus. Ce n'est pas un mâle alpha, il manque comme tout le monde de confiance en soi, il a découvert sur Skyblog que les gens n'étaient pas ou ange, ou démon, mais un peu des deux, il ne réfléchie pas trop à ce qu'il va mettre le lendemain pour aller en cours, comme son illustre modèle Albert Einstein, il a eu ses premiers émois érotiques en lisant des bandes dessinées d'aventure, et il considère la cigarette comme un moindre mal dans une société aussi mortifère. Il est omnivore, apolitique et athée. Son fantasme féminin est un croisement entre Nathalie Portman, Lucy Liu et Lara Croft.

Ce beau specimen d'Homo Sapiens Linné 1758 s'en va donc découvrir les territoires jusqu'alors seulement effleurés des filles. Et ce qu'il croit établie ne le sera bientôt plus, et ces aventures diverses dans le royaume de Satet vont être un véritable labyrinthe.
En effet, les filles ont la fâcheuse habitude de le prendre pour un psychologue. Alors là où il ne voudrais qu'amour et volupté, il endosse deux vies sur ses frêles épaules, qui inévitablement finissent par céder. Ce n'est pas grave se dit Gary, la prochaine sera la bonne. Mais déjà les filles se succèdent, et l'idée si bien façonnée d'un amour pur avec "la" personne se heurte à une réalité toute différente. Et à ne plus croire en l'amour, en l'ultime incarnation de la beauté féminine, toutes les filles finissent par se ressembler, et deviennent substituables les unes aux autres.

Evidemment, Gary, fort de sa matière grise chèrement acquise, se débrouille pour que cet état de fait n'apparaisse jamais aux yeux de ses galantes. Mais là où il se croit fort, encore une de ces conviction bien établie, Gary va vite se rendre compte que, mine de rien, il est aussi un paquet de sentiments, et qu'à ce petit jeu les plus audacieux s'en mordent les doigts. De bourreau des cœurs il devient victime incomprise d'un monde incompréhensible. Que sont ces créatures pourtant si belles, qui dissimulent si bien le lisier qu'est leur existence ? Tantôt psy de fortune, tantôt jouet idiot, Gary sort dévasté un peu plus de chacune des conquêtes qui traversent ses bras. Il est surtout familier des moments pénibles d'incompréhension absurde qui semblent fonder ses relations.

Car Gary croit dur comme faire à une chose : les hommes sont des animaux, bourrés d'instincts et de pulsions, atténués par une éducation et des lois. Il est sûr que sous cette couche culturelle, l'être humain est bridé, refoulé, sans moyen de libérer la tempête qui l'anime. Il en est sûr. Ses livres le lui ont dit.

Il sait très bien qu'à chaque rencontre entre deux êtres humains s'opère un étrange mais naturel manège, conscient ou inconscient. Une évaluation qualitative sexuelle basée sur nos propres critères de sélection, mais toujours poussée par l'instinct de reproduction, quand ce n'est pas l'instinct de survie. Alors pourquoi toutes ces jérémiades ? Pourquoi cette conscience qui vient tout compliquer ? Parce que Gary. Parce que.

Qu'il le veuille ou non, Gary est un être humain, et bien qu'il soit régie par ces instincts sous-jacents, il n'en reste pas moins un homme conscient et intelligent.

Et il est encore plus familier de la triste mise en scène de la première nuit. Le plus souvent, cela se passe chez lui. En prévision, il change ses draps, fait le ménage, met de l'ordre, histoire de se cacher encore plus derrière le superficiel. Mais combien de fois s'est-il retrouvé abandonné à la dernière minute, et contraint à une nuit solitaire ? Gary ne compte plus. Il ne compte plus les retours chez lui, en traînant les pieds. L'ouverture de la porte de son appartement qu'il ne retiendra pour personne avant qu'elle ne claque dans un bruit horriblement métallique. Il ne compte plus non plus le nombre de fois où il a ouvert la porte de sa chambre, et qu'il est resté sur le palier, à regarder ce qui n'était plus sa chambre. Trop rangée, trop loin de l'habituel bordel ambiant. Il n'était alors plus chez lui, mais devant une mise en scène macabre de son propre échec, de sa propre supercherie. Et il l'a prenait en pleine poire. Et généralement, Gary pleurait. Ca faisait du bien, et ça permettait de ne pas trop culpabiliser.

Après tout ces événements, Gary s'est senti plus fort, il a juré qu'on ne l'y reprendrais plus. Qu'il ne tomberais plus dans le piège. Mais évidemment, qui voit venir ce genre de piège ? On y entre comme dans une confiserie, pour finalement se faire enfermer dans la boutique par des prêtres pédophiles.
Alors Gary est retombé dans le piège. Ou en tout cas il y est entré, encore. Il ne fait plus qu'attendre le couperet. Il espère que cette fois il ne s'abattra pas, mais comme il l'a découvert, au royaume des femmes, rien n'est plus établie. Plus de lois bien faites, tout reste insaisissable.

Alors pour l'instant, Gary se perd dans ces yeux noisettes, et se prend à ne pas penser à demain. Il entend déjà le cliquetis fragile du loquet de la guillotine au dessus de sa tête, mais tant qu'il est dans ses bras, il s'en contrefout.


Bonne chance Gary.


Gort


Playlist : Goblin / 'Tenebre'

http://fr.wikipedia.org/wiki/Fille_%28jeune_femme%29
http://skil.chez-alice.fr/dieux.htm
http://fr.wikipedia.org/wiki/Homo_sapiens

5 commentaires:

Valou a dit…

Particulièrement bon, cet article. Rien à dire. Donc commentaire inintéressant.

...

(T'as raté mon coup, vite mon vieux Valou, trouve un truc intelligent à dire avant de taper un blanc de 15 minutes en te bavant sur l'épaule) Donc oui, je disais, article intéressant car plus intime, plus ancré dans la généralité. Donc plus juste, plus direct.
Personnellement, je ne peux effectivement pas prétendre que toutes les situations que tu cites me sont arrivées/ vont m'arriver; le fait est cependant que la vie façonne le concept du désir amoureux de telle sorte que je pense que tu toucheras pas mal de monde avec un article comme celui-ci. Sentiments de déjà-vu, relans d'amour vécus, expériences familières, appelle cela comme tu veux, cela touche tout un chacun. L'amour, ou plutôt sa recherche, reste, je pense, l'espoir du monde.
J'aime.

(fiouf...sauvé. bon...maintenant 'faut que je vérifie qu'il n'y ai pas de fautes...)

Gort a dit…

Thx Dude. Ca me va droit au coeur ce que tu me dis là.

Anonyme a dit…

Au delà de l'analyse, c'est l'écriture qui s'affine, qui s'aguise de plus en plus. Et je te le promets, maintenant elle coupe droit dans mon coeur.

Gort a dit…

Merci, cher(e) Anonyme. Ton commentaire est fort beau également.

Shaar-Lun a dit…

Qui aurait cru qu'un escargot pouvait avoir autant d'états d'âme ...
Plus sérieusement, le fait de s'auto administrer la décharge de se voir tel qu'on n'est pas, la trahison de soi par soi, c'est un chouette paragraphe.

Playlist : Nujabes / 1st Samurai
(J'aime bien ce petit coté Werber dans la petite précision sur ton inspiration musicale)